• "Selfie, selfie, dis-moi qui est la plus belle ? "

     

        C’est la mode, l’injonction même ! Il faut faire des autoportraits avec son téléphone portable à tout-va, des « selfies », comme on dit, pour être à la mode et connectés. Ainsi, sur les réseaux sociaux, pullulent des portraits de jeunes hommes et surtout de jeunes femmes narcissiques qui se trouvent belles et souhaitent partager leur pitoyable autosatisfaction. Rien de plus triste, je trouve, que ce genre d’exercices qui démontre surtout un vide abyssal de la part de ces « poseuses » des temps modernes qui, en manque d’inspiration, se font tirer le portrait au lieu de s’intéresser à autrui ou à la marche du monde.

    En énonçant ces propos, je serais moralisatrice et rabat-joie ? Peut-être. Mais j’avoue que ce genre de pratique me hérisse le poil. Certains me diront que je suis jalouse du physique de ces apprentis mannequins et que si j’étais dotée d’un physique plus attrayant et plus glamour, je n’en ferais pas une telle histoire de ces selfies et de ces expositions de photos personnelles en tout genre sur les réseaux sociaux. Qui sait ? Mes contempteurs ont sûrement raison. Je suis sans doute jalouse, moche, grosse et aigrie. Il n’empêche que si j’avais le physique de Marylin Monroe, je ne crois pas que je m’abaisserais à ce genre de pitoyable pratique. Non, je garderais mon joli minois pour mes proches, mes amis, ceux qui comptent réellement pour moi, mais certainement pas pour des quidams inconnus avides de sensations fortes et de curiosité malsaine. Non, très peu pour moi, ce genre d’exhibitions sur la toile !

    Mais au-delà, de ce que j’aurais fait si j’avais un physique à la Monica Bellucci, se pose une question sociétale plus cruciale, celle de l’évolution « narcissisante » de notre monde. Car le selfie n’est autre que le reflet (c’est le cas de le dire !) d’un univers étriqué, autocentré, où toute parole s’efface au bénéfice d’une image trompeuse et figée et qui, grâce à la puissance de diffusion de nos réseaux sociaux, se donne en pâture à la terre tout entière.

    « Le monde n’appartient plus à ceux qui se lèvent tôt » mais à ceux qui les premiers postent sur la toile leur autoportrait seul ou accompagné de leurs proches, ceux, qui, béats et souriants, se pâment de bonheur dans des lieux de vacances aussi paradisiaques les uns que les autres avec des conjoints aussi beaux que Marlon Brando dans sa jeunesse, aussi intelligents qu’Einstein, aussi riches que Crésus et des enfants heureux et surdoués aux jolies boucles blondes. Des images d’Epinal, en somme, qui ne disent rien de la réalité du quotidien mais qui tendent à masquer la vacuité d’une existence vouée au paraître et à l’approbation de la foule.

    La Covid n’a malheureusement pas changé grand-chose à cette tendance nombriliste. Au contraire ! Confinés chez eux, les poseuses s’en sont même donné à cœur joie pour montrer à qui mieux mieux qu’elles étaient des femmes parfaites, des mères irréprochables qui faisaient travailler si efficacement leurs bambins, des épouses extraordinaires cuisinant à merveille, des femmes fatales au QI aussi haut que le Mont Everest. Ainsi, tous les jours, la toile recueillait son lot de clichés brillants aux couleurs criardes, montrant des gens heureux et abrutis de superficialité, imbus de leur petite personne, pétris de bêtise crasse et d’égoïsme. Non la COVID n’aura malheureusement pas eu raison de leur folie ! Dommage ! Faut-il une autre pandémie pour ramener ces obsédés de l’image à la raison ? Espérons que non !


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